Ce qui se passe à Volkstown dans les jours qui entourent l'union de Reagan et Mika.
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J’ai chaud. C’est sans doute ce qui me réveille. La chaleur et le fait de sentir de grosses gouttes de sueur rouler sur mes tempes. Lorsque j’essaie de bouger pour me dégager, j’y gagne un grognement et une main qui se serre sur ma taille. J’ouvre brusquement les yeux pour découvrir Caleb dont le corps repose à moitié sur moi et à moitié sur le canapé. La raison de cette chaleur est assez évidente quand je vois que nous sommes tous les deux torse nu, peau contre peau. Une énorme couverture nous recouvre également, mais j’ai dû la déplacer en bougeant. Caleb est profondément endormi, son nez contre mon épaule et je profite un instant de ce moment. Les cheveux courts de mon soldat caressant ma mâchoire, son souffle sur ma peau échauffée, ses doigts serrés sur ma hanche de manière possessive. La raison de cette position me revient malheureusement trop vite et je me mets à tressaillir, regardant autour de moi, persuadé de voir apparaitre le chacal aux yeux d’abysses. Il n’est pas là, nulle part en vue, mais lorsque je tends l’oreille, je capte des voix provenant de la cuisine, l’une d’entre elles ne m’est pas inconnue. Je me dégage le plus doucement possible de Caleb et ne résiste pas à le contempler quelques secondes. Ses sourcils sont à présent froncés, comme si quelque chose lui déplaisait soudainement. Je souris un peu en imaginant qu’il pourrait s’agir du fait de ne plus me tenir dans ses bras. J’ai envie de revenir me blottir contre lui, mais même en reprenant ma place, je ne peux pas me rendormir, je suis maintenu éveillé par le bruit de vaisselle. Une tasse que l’on pose, une cuillère qui fait entendre son tintement. Puis deux voix. Celle de Bast que j’ai déjà reconnue et celle d’Horus qui discutent dans la cuisine. Cette voix tranchante et pleine d’autorité, je sais que c’est la sienne avant même de le voir vraiment. - …Plutôt difficile. Le danger est à présent décuplé. Peut-on vraiment demander cela ? - Et quel autre choix avons-nous ? La voix de Bast parait à peine plus qu’un murmure fatigué. Elle, toujours si mystérieuse et puissante, sonne comme rien de plus qu’une femme au bout du rouleau. Bien que je ne lui ferais certainement pas part de cette constatation, Aton seul sait ce qu’elle ferait de moi. - Tu sais que ce n’est pas de ta faute, n’est-ce pas ? Tu l’as protégé aussi longtemps que tu l’as pu, petite sœur. - Mais aujourd’hui, je vais devoir lui demander ce sacrifice… - Je sais, souffle Horus. Mais comme tu l’as dit. Lui seul peut y entrer et en ressortir. - On ne sait pas s’il en ressortira ! Am-heh… Je suis resté immobile un moment, mais je me trouve à présent dans l’encadrement de la porte. Leurs regards se fixent immédiatement sur moi. Des yeux de chat et des yeux de faucon. Plus un son ne passe leurs lèvres, Horus a le visage complètement impassible, mais Bast… ses traits traduisent une émotion et ça suffit à me choquer. Je ne parviens pas à lire laquelle cependant. J’ai bien compris que leur échange me concernait et j’en ai saisi le principal. Ma vie aurait déjà été risquée pour leur mission, mais ce sera pire maintenant que j’ai reçu la morsure d’Am-Heh. - Est-ce que Caleb va s’en sortir ? demandé-je d’une voix qui me parait bien trop calme. - Il a toutes les chances de son côté, répond Horus. Il sera sûrement celui qui mènera l’aune jusqu’à nous. - Parce que je serai mort ? - C’est une possibilité. Bast n’a pas desserré les lèvres, mais elle ne me lâche pas des yeux. Aussi, je continue de m’adresser à Horus. - Vous ne pouvez demander à personne d’autre ? - Tu es le seul demi-dieu de notre panthéon. Ta part humaine est indispensable à ton entrée dans le monde des morts et ta part divine indispensable pour avoir une chance d’en sortir. Je hoche la tête avec toujours autant de calme, mais je ne ressens plus rien de la chaleur qui m’a réveillé au contact de Caleb. Je me sens presque résigné. - Pourquoi les risques sont-ils plus élevés ? - Le pouvoir d’Am-Heh est puissant au royaume des morts et il t’a mordu, il te poursuivra. J’ai bien envie d’en savoir plus sur la mission, mais je devrais attendre Caleb pour poser mes questions. - Ne lui dites pas que je ne reviendrai pas, soufflé-je sans avoir à préciser de qui je parle. - Il y a des chances pour que tu t’en sortes, répond immédiatement Bast. - Une sur dix, précise Horus et je souris. - Je n’ai jamais été du genre chanceux, Mère. Il ne me semble plus étrange de l’appeler ainsi depuis qu’elle est venue me chercher dans les montagnes désolées. Bast secoue la tête, mais je me sens fatigué et sans un regard en arrière, je retourne me blottir dans les bras de Caleb qui sourit dans son sommeil en m’attirant contre lui. *** Je suis occupé à préparer à manger lorsque Djet nous rejoint dans la cuisine en se frottant les yeux. Le moins qu’on puisse dire, c’est que je suis soulagé – non seulement de le voir debout, mais de le voir tout court – on ne peut pas dire que les dieux soient de grands bavards. Lorsqu’ils ont disparu, je ne m’en suis même pas aperçu et lorsqu’ils sont revenus il y a cinq minutes, seule l’ombre de leurs mouvements m’a indiquée qu’ils étaient de retour. Depuis qu’il s’est levé, Djet a accaparé la salle de bain. J’ai d’abord pensé qu’il avait besoin de soulager l’érection que j’ai sentie contre moi et qui m’a poussée à me lever cinq minutes avant lui pour… eh bien cette raison précise. Cependant, en le voyant arriver en frottant ses yeux rougis, je sens mon sang qui se glace dans mes veines. J’étends un bras pour l’inviter à me rejoindre, ce qu’il fait sans aucune hésitation. Il se colle contre mon flanc et je resserre mon bras autour de lui. C’est plus fort que moi, je fusille Bast et Horus du regard, parce que je ne veux pas qu’ils le voient dans un moment de faiblesse. Ce n’est pas eux en particulier, même s’il s’était agi de mon frère, j’aurais eu cette réaction. Bien que dans ce cas de figure, j’aurais pu lui demander de débarrasser le plancher. J’approche mon visage du sien, si bien qu’on ne peut pas être plus proche sans s’embrasser. Mon bras le gardant contre moi et mon épaule cachant nos visages, j’ai l’impression d’avoir un peu plus d’intimité. - T’as pleuré ? demandé-je le plus bas possible. - Non, répond-t-il d’une voix enrouée en me faisant un petit sourire. Juste un peu de shampoing dans l’œil. Je lui souris comme si je le croyais et j’embrasse sa tempe. Il a peut-être oublié que je suis flic, j’ai un radar à mensonge quelque part dans mon attirail cérébral. Mais s’il ne veut pas le dire, je ne peux pas l’y forcer… Je pourrais insister, mais avec la frayeur qu’il m’a faite la veille, je refuse de risquer qu’il se braque et s’éloigne de moi. - Ma mère et Horus voudraient nous parler, m’informe-t-il quand je pose les assiettes alors qu’il s’est déjà installé face à eux et qu’ils jouent à un duel de regards depuis trois bonnes minutes. - Mère ? soufflé-je du bout des lèvres, mais lui ne prend aucune précaution pour me répondre. Il mordille sa lèvre avant de bafouiller : - Euh, oui, c’est euhm… - Djet est mon fils, coupe Bast avec un geste de la main, comme si elle ne voyait aucune raison de s’intéresser à ce sujet. Je pense que ça en dit long sur ma vie ces derniers temps que je décide de laisser couler en pensant qu’on a des choses plus importantes à discuter. - Nous devons vous parler de la menace qui pèse sur nous tous. - Mais en particulier sur vous, ajoute Horus avec un léger mouvement des lèvres comme s’il venait de faire une bonne blague. Je lève un sourcil dans sa direction, mais il a dû en voir d’autres parce qu’il ne change pas d’expression pour si peu. *** Caleb s’assoit à côté de moi et me regarde d’une façon étrange, je lui souris sans bien savoir pourquoi. Mais notre attention revient à Horus lorsqu’il se racle la gorge. - Par où commencer ? souffle Bast en lui jetant un regard égaré. - Par la raison de tout cela, je suppose, répond-t-il immédiatement. La déesse a un rire sans joie et replace une mèche de ses cheveux d’ébène derrière son oreille avant de hocher la tête. - La raison est que les dieux sont désespérés, avoue-t-elle. De toutes les raisons possibles, je ne m’attendais pas à celle-là. - Le pouvoir d’un dieu tient dans le nombre de ses croyants. Malheureusement, notre panthéon se meurt. Nos traditions et nos croyances se sont perdues au fil du temps. Certains s’en sortent mieux que d’autres, j’ai pour ma part, toujours des croyantes, bien qu’elles me vénèrent sous différents noms. Mais pour la plupart d’entre nous… notre pouvoir disparait. C’est la raison pour laquelle les dieux des enfers ont décidé de libérer une armée qui soumettra les humains à nouveau. Renouveler la croyance par la terreur s’il le faut. Je sens les cheveux se dresser sur ma nuque. Caleb et moi échangeons un regard. Je ne sais pas s’il ressent la même terreur que moi à l’idée de ce que cela pourrait signifier. Imaginer que d’autres créatures de l’engeance d’Am-heh pourraient fouler la terre me donne envie de prendre mes jambes à mon cou. Un instant de silence passe avant que je ne trouve la voix pour demander : - Et comment je pourrais empêcher ça ? Caleb doit entendre le tremblement dans ma voix, parce que sa main se serre sur mon genou sous la table. Je la recouvre de ma propre ma main sans réfléchir. Son soutien est plus que bienvenu. - Vous devrez entrer aux enfers et vous emparer de l’aune de Mâat qui sert au jugement des âmes, répond Horus, imperturbable. Le regard de Bast passe de Caleb à moi et je crains un instant qu’elle ne révèle mes maigres chances de retour, mais elle n’en fait rien. - Caleb pourra te protéger, mais le talisman qui le protégera des morts l’empêchera d’entrer au tribunal d’Osiris, tu devras prendre l’aune toi-même Djet. Sans elle, les âmes immortelles ne pourront pas regagner leurs djets, leurs enveloppes charnelles. Ma main serre plus fort celle de Caleb et je tourne les yeux vers lui. - Ça va aller, souffle-t-il. Je ne sais pas s’il est courageux au point de ne pas être troublé par tout ça, ou s’il s’efforce de maintenir une apparence confiante pour me rassurer. Dans tous les cas, ça fonctionne. Je puise la force de ne pas paniquer dans son sourire qui me dit qu’il sera à mes côtés, puis je fais à nouveau face à ma mère avec un hochement de tête résolu. - Dis-m’en plus. |
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