Sœur étrangère
Quand la nuit arrive à nouveau
La ville aussi noire qu’un tombeau
Étouffe tes pleurs.
Celui que tu aimes est perdu
Et le monde ignore l’étendue
De ta douleur.
Et je ne suis rien de plus qu’une ombre
Drapée dans une étoffe sombre
Cousue de nuit
Mais jour après jour je témoigne
De la douleur qui empoigne
Ton cœur meurtri.
J’aurais aimé pouvoir vraiment
Apaiser tes sombres tourments
Même à demi.
Étreindre tes épaules tremblantes,
Sécher tes deux joues ruisselantes
Être une amie.
Comme je souffre de ne pouvoir
T’offrir un vestige d’espoir
Une lumière.
Mais ma forme n’a rien d’humaine
Bien que nos âmes soient les mêmes
Trop solitaires.
Et j’écouterai dans la nuit
Les confessions, les pleurs, les cris
D’une étrangère.
Je ne tiendrai jamais sa main,
Mais mon cœur chantera pour le sien.
Dans sa misère.
La ville aussi noire qu’un tombeau
Étouffe tes pleurs.
Celui que tu aimes est perdu
Et le monde ignore l’étendue
De ta douleur.
Et je ne suis rien de plus qu’une ombre
Drapée dans une étoffe sombre
Cousue de nuit
Mais jour après jour je témoigne
De la douleur qui empoigne
Ton cœur meurtri.
J’aurais aimé pouvoir vraiment
Apaiser tes sombres tourments
Même à demi.
Étreindre tes épaules tremblantes,
Sécher tes deux joues ruisselantes
Être une amie.
Comme je souffre de ne pouvoir
T’offrir un vestige d’espoir
Une lumière.
Mais ma forme n’a rien d’humaine
Bien que nos âmes soient les mêmes
Trop solitaires.
Et j’écouterai dans la nuit
Les confessions, les pleurs, les cris
D’une étrangère.
Je ne tiendrai jamais sa main,
Mais mon cœur chantera pour le sien.
Dans sa misère.
De la haine que l'on se porte.
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Désabusés
On entend, de temps en temps,
Les fous nous dire « Dieu est vivant » Ils l’appuient de discours fervents, Que nous moquons discrètement. Faisant mine d’être conquis, Nous les écoutons d’une oreille, Pour vite oublier leurs conseils Au fond d’un verre de whisky. D’aucuns diront que nous sommes froids, Que nous moquons gratuitement, Mais ce que l’on rit à présent, Sont nos croyances d’autrefois. Car nous aussi nous étions fous, Priant dieu, destin ou avenir, Priant de tout cœur pour finir Par ne plus croire en rien du tout. Les vagues d’espoir ont heurté Les rochers des réalités Laissant comme écume à nos pieds La carcasse de nos rêves brisés. Pardonnez donc nos rires moqueurs, Vivez heureux dans vos croyances, Embrassez donc votre allégeance, Quel que soit votre seigneur. Prêchez où vous serez requis. Nous ne cherchons pas l'absolution, Trouvant pour seule rédemption Le fond d’un verre de whisky. |
Sombre poète
C'est un sombre poète, un artiste incompris.
De ceux que l'on croise, sans les voir, dans la vie. Mais il se révèle à chaque fois qu'il écrit, Il enchaîne les vers et par eux nous séduit. Il communique sa peine, toujours à demi-mots, Parle de celle qu'il aime - qui ne le trouve pas beau. Il confie ses larmes à une feuille de papier, La torture de son âme dont il ne peut parler. Son cœur est trop fragile et trop bon pour cette vie, Pour cette indifférence qui chaque jour le détruit, Mais moi, je lis ses vers et je suis éblouie, Par ce sombre poète, cet artiste incompris. |
Que vive le rêve
J’ai senti sur mes lèvres le goût sucré des tiennes,
Rappelant la saveur du miel et des amandes. Je ne les ai quitté qu’au son de ta commande, Luttant contre moi-même que je ne les retienne. J’ai entendu un air lent et nostalgique, Ce n’était que le vent, à travers les feuillages. Mais comme l’océan au fond d’un coquillage, J’ai reconnu ton nom dansant sur sa musique. Je pleure bien souvent dans mon lit à l’aurore, Les matins sont plus durs à mesure du temps. Les rêves s’éternisent juste quelques instant, M’abandonnant à toi et à la vie d’alors. Ce ne sont aujourd’hui plus que des souvenirs, Photographies jaunies d’un album abîmé. Moindres réminiscences de ceux que j’ai aimés. Ceux que je rejoindrai à mon dernier soupir. |
Je suis sourd
On entend dans la ville s’élever les cris d’amour,
Ils viennent des jeunes voix de ceux qui savent vivre. Ils s’offrent des œillades, des promesses de toujours, Échangent des baisers qui les laissent fous et ivres, Mais, moi je les ignore : je suis sourd, je suis sourd. On entend le soir s’élever les berceuses, Litanies rassurantes, chantées d’une voix tendre C’est la voix que les mères offrent à la vie précieuse Qui calmera ses pleurs pour pouvoir mieux entendre. Moi, je ne l’entends pas. Je suis sourd, je suis sourd. Je ne sais plus entendre ce qui en vaut la peine. Mon ouïe est intacte, mais mon cœur engourdi. M’arrachant à l’amour, pour m’offrir la haine, Ce fût le désespoir qui un jour m’assourdit. Le bien m’est étranger, même au son des tambours Je ne l’entendrais pas. Je suis sourd, je suis sourd. Insaniam
Dis-moi d’où provient la faiblesse des Hommes ?
Jamais un animal ne serait assez fou Pour pleurer et noyer au fond d’un verre de rhum Les déboires d’un cœur qui aime et qui échoue. Jamais une colombe n’a inondé ses ailes En essuyant les larmes qui roulent sur ses joues. Jamais un coyote ne fut assez fidèle Pour souffrir du manque, comme on souffre des coups. Et quand mes yeux sont rouges de t’avoir trop pleuré. Quand j’ai tant dis ton nom que ma voix me fait mal Je lève un regard noir vers ceux qui m’ont créée. Une question murmurée : « que ne suis-je animal ? » |
Gabriel
J’ai rêvé bien trop de fois,
Doux Gabriel, De tes yeux et de leur éclat, Reflets du ciel. Le soleil pâle des matins froids Me remémore. Que la chaleur de tes bras Manque à mon corps. J’avais quinze ans et à cet âge Malheureusement. Le cœur se retrouve otage Trop aisément. On me parle de l’eau qui passe Dessous les ponts. Mais l’eau n’efface pas, hélas Ton doux prénom. Mon souvenir t’est fidèle Mon vieil ami Mélange doux-amer, rappel D’une autre vie Mon cœur est ruiné aux amours Depuis dix ans. Il n’en veut d’autre, il est toujours Ton partisan. Il m’arrive de penser parfois, Cher Gabriel. Que tes yeux ont donné l’éclat Au bleu du ciel. On me parle de jours qui passent Et d’avenir. Mais les jours n’effacent pas, hélas, Ton souvenir. |
Mon père, ce poète
Moi, mon père il était poète,
Il aimait le monde à sa façon. De son point de vue super chouette, Tout était beau, même les sales cons. D’ailleurs, il me disait souvent, En souriant d'un air narquois On n'dit pas sales cons, mais bonnes gens. Et moi, je lui demandais pourquoi, Alors les yeux levés au plafond, Il me répondait à voix basse, Que les bonnes gens sont bien trop cons, Et que l’ironie les dépasse. Et je suis poète moi aussi, Même s’il n’est plus là pour le voir. Je déclame même mes poésies, Face à la foule certains soirs. Et quand je fini la soirée, Face aux gens jurant leurs grands dieux Que je devrais trouver un métier, Qu'être poète ce n'est pas sérieux. Je leur accorde un sourire fourbe, Et un hochement de tête résolu, Pour leur lancer quand je me courbe « Et bonnes gens, je vous salue ! » |
Le vieux conteur
Il a le regard un peu vitreux,
Il a des rides au bord des yeux, Il a des histoires plein la tête, Qu’il raconte entre deux cigarettes, Quand il dit qu’il les a vécus, Je souris, pour qu’il continue, Et pourtant, je ne l’ai jamais cru, Le vieux bonhomme du bas de la rue. Il me parle de bistrots fermés, De femmes qu’il a un jour aimées, D’une guerre où il était là, D’histoires en veux-tu en voilà. Je le prends pour un fou, pour un sage, Quand il décrit ses paysages, Un grand sourire sur son visage, Moi, je l’écoute et je voyage. Il défie la réalité. De contredire ses vérités. Et comme tout est bien trop noir, Moi, c’est lui, que je préfère croire. Il dit que le monde se crève, Que si Dieu a créé les rêves, C’est pour qu’on puisse tenir le coup, Pour que l’on ne devienne pas fous. Je ne sais pas ce qu’était sa vie, Elle était rude à mon avis, S'il raconte qu’il était Pasteur, Pirate, Astronaute, Cascadeur, Je le croirai quoi qu’il me dise, Bien que je le vois mal homme d’église. Un conteur, comme on n’en fait plus, Le vieux bonhomme du bas de la rue. |
C'était hier
Où sont les années que nous avons partagées,
Quand on pensait qu’à trente ans, on serait âgés. Elles sont loin maintenant, j’en ai peur. L’horloge laisse avancer les heures. « Arrête-toi ! », je la supplie. Mais le temps passe, et tu m’oublies. Dis, que reste-t-il maintenant de nos promesses ? Celles que l’on chuchotait hier. Réduites en pièces ? Tu sais que les yeux clos, je les entends encore. Au fond de ma mémoire, ça reste l’âge d’or. Mon souvenir les aura certainement embellies. Et toi, de ton côté… tu les oublies. Elle est étrange à voir parfois l’œuvre du temps, Plus les minutes passent et moins on se comprend. Tu ne ris plus à mes blagues, je ne sais plus quoi te dire, Les gosses fous qu’on était ont dû grandir. On reste encore ensemble, parce qu’on est établis, Mais les raisons de s’aimer… on les oublie. Moi je préfère partir avant qu’on se déteste, Avant qu’on se balance des horreurs indigestes. Et quand tu seras seul, dans un lit bien trop grand, Alors les souvenirs reviendront en courant. Mais mieux vaut se quitter, même si tu me maudit, On s’est aimés enfants. On a grandi. |
Rue Malheur
J'ai marché si longtemps dans la rue Malheur
Que je ne sais même plus depuis quand je suis là. Je déambule sans but, sans plus compter les heures Car je sais bien au fond que je n'en sortirai pas. Je n'ai cure de l'espoir, qui dit-on nous fait vivre Tout comme des ambitions, des rêves de futur Je bois à la noirceur jusqu'à ce qu'elle m'enivre Aux blessures trop profondes pour souffrir une suture. Oh, comme je les maudis, tous ces badauds d'en face Cheminant tranquillement Avenue du Bonheur. Leurs rires et leurs soleils, tels des visions fugaces Enveniment les plaies des passants rue Malheur. Alors nous nous retrouvons au Bar des égarés Buvant jusqu'à la lie à la coupe des pleurs. Où la mort vient parfois nous payer une tournée Qui précède, ou suit celle, de son ami Douleur. Pour ma part, c'est Colère qui est mon préféré Il vient boire avec moi, dans ce bar rue Malheur. Même lorsque je suis ivre, il ne me quitte jamais Titubant dans cette rue que je connais par cœur. |